Quand le crowdsourcing, le matching affinitaire, le chatbot et autres nouvelles technologies passent en mode RH, c’est l’ensemble du recrutement qui se voit profondément remis en question. Incroyable, mais vrai, des machines décèlent les compatibilités entre candidats et employeurs, pré-sélectionnent les candidats à fort potentiel ou recommandent les meilleurs profils. Quel est l’impact sur le secteur ?

Recrutement 2.0 : à l’aube d’une nouvelle ère ?

Oui, c’est vrai, nous ne pouvons pas nous empêcher de le répéter à l’envi : avec l’avènement du digital, le secteur du recrutement connaît de nombreuses évolutions. Et il ne s’agit pas de petites modifications aux faibles conséquences. La robotisation et l’automatisation sont une véritable révolution - de celles capables de modifier la face du monde.

A l’échelle du recrutement, le digital permet, entre autres, de simplifier et de faciliter les tâches des recruteurs, mais surtout de réaliser des embauches bien plus quali. En tout cas, c’est l’ambition affichée. Car qu’il s’agisse de chatbot, de matching affinitaire RH ou de big data, les algorithmes et l’analyse des données doivent in fine aider les professionnels du sourcing à repérer rapidement les profils les plus adaptés aux postes et à la vie de l’entreprise.

« Rapidement », car sans vouloir jouer l’oiseau de mauvais augure la guerre mondiale des compétences a déjà commencé. Et pour être certaines de s’adjoindre les services des talents dont elles ont besoin, les organisations ont tout intérêt à avoir un coup d’avance sur leurs concurrents. Gagner du temps lors du processus RH devient vital : il faut recruter vite et bien.

Recruter au premier regard

Mais dans les faits qu’en est-il vraiment ? Alors que les expérimentations autour de l’intelligence artificielle sont toujours en cours, quels premiers bilans peut-on en tirer ? La machine parvient-elle à faire coïncider avec exactitude l’offre et la demande ? Réussit-elle à surpasser l’intelligence de l’homme en la matière ? La crainte que le DRH ne soit plus que l’assistant des robots, ressurgit régulièrement : 30 % des DRH sont même convaincus qu’à l’avenir les chatbots géreront bien mieux les recrutements que les humains.

Le matching affinitaire RH conforte l’idée que le professionnel RH est voué à devenir un accessoire. Cette avancée technologique jouerait le rôle d’un Cupidon RH, les flèches en moins. En effet, elle projette de faire se rencontrer des entreprises et des candidats ayant un fort taux de compatibilité en termes de savoir-faire, savoir-être et de motivation.

Sommes-nous sur le point d’assister à une pluie de coups de foudre professionnels ? Demain, évoluerons-nous dans une sorte d’osmose, un monde harmonieux où les salariés seraient heureux de se rendre chaque jour au travail et où les dirigeants auraient l’esprit léger d’avoir recruté les bons éléments, tant sur le plan humain que technique ? Une divine idylle en somme.

Entre progrès et perte d’autonomie 

Rien ne prouve encore qu’il s’agisse bien-là du sens de l’Histoire. Les contes de fées racontent rarement l’après-badinage. On le sait : le quotidien érode le couple et ce, alors même que tout semblait écrit pour durer. Dans un interview accordé à France Inter en décembre 2017, Jérémy Lamri, CEO de Monkey Tie, spécialiste du matching affinitaire RH, souligne qu’il existe effectivement des risques notamment lorsqu’éthique et algorithmes sont en froid. La machine peut commettre des erreurs. Quand l’homme tenté de se reposer complètement sur la machine, se dépossède lui-même de son rôle de décideur.

« [...] Aujourd’hui, on a encore une performance qui dans certains cas reste très limitée. Parce que les données qu’on met dans le système déterminent la qualité des résultats. Et qu’on n’a pas toujours des données de très bonne qualité. Parce qu’historiquement, la RH n’est pas un métier de la donnée, c’est plus un métier de l’humain. » Aïe, la mauvaise rencontre est possible même avec le matching affinitaire RH. L’intelligence humaine reste une nécessité absolue, tout d’abord parce que c’est elle qui va programmer la machine, lire les données et analyser les résultats.

Recrutement de demain : un juste équilibre entre l’homme et la machine

Quelle que soit la méthode choisie pour booster son recrutement, il conviendrait alors d’adopter le « Mix and Match », cette tendance qui consiste à mélanger les genres pour viser une cohérence globale. Le crowdsourcing RH repose sur cet équilibre outil-humain. En effet, l’idée est de faire appel à des acteurs externes au recrutement (salariés, followers, prestataires, clients…) pour trouver les candidats idéaux.

Il s’agit ni plus ni moins que de faire appel à ses contacts personnels et professionnels en s’appuyant sur les réseaux sociaux, les intranets ou encore des plateformes spécialistes de la cooptation et la recommandation. En augmentant son périmètre d’intervention, l’entreprise élargit ainsi son vivier de candidats.

De là à trouver rapidement la perle rare dans un délai limité, cela reste à voir. Le crowdsourcing demeure une bouteille jetée à la mer.

« La vie n’est une belle aventure que lorsqu’elle est jalonnée de petits ou grands défis à surmonter, qui entretiennent la vigilance, suscitent la créativité, stimulent l’imagination et, pour tout dire, déclenchent l’enthousiasme, à savoir le divin en nous », déclare Pierre Rabhi. Face à la guerre des talents, l’activité du recrutement relève de nombreux challenges, expérimente et ne cesse de faire preuve d’originalité. Les résultats sont irréguliers selon les organisations. Ce que l’on retient, c’est que finalement, chaque entreprise selon ses besoins et sa culture est amenée à bousculer les codes du recrutement. La personnalisation semble la clé. A chaque entité de trouver son algorithme pour attirer à elle les compétences nécessaires à son évolution.